La gestion de crise dans une institution culturelle repose sur une double exigence : protéger physiquement des œuvres souvent uniques au monde, et préserver son capital le plus précieux, la confiance du public. Un incendie dans un monument historique, un acte de vandalisme sur un chef-d’œuvre, une polémique qui enfle autour d’une exposition… chaque incident prend une dimension émotionnelle et symbolique immédiate. Dans ce secteur, la valeur n’est pas seulement financière, elle est patrimoniale, historique et affective.
Pourtant, de nombreux musées, fondations ou théâtres, souvent dotés de ressources limitées, ne sont pas suffisamment préparés à faire face à la brutalité d’une crise. Chez CriseHelp, nous sommes convaincus qu’une méthodologie de crise adaptée est la clé pour sauvegarder cet héritage. Ce guide explore les risques spécifiques au monde de la culture et les piliers d’une résilience à la hauteur des enjeux.
Cartographie des risques : les crises qui menacent le monde de la culture
Si le contexte des des musées et institutions culturelles est unique, les menaces qui pèsent sur elles s’inscrivent dans les grandes typologies de crises qui affectent toutes les organisations. Les identifier clairement est la première étape de la préparation.
1. Les crises opérationnelles et environnementales : la menace sur le bâti et les collections
C’est le risque le plus tangible. Il concerne la défaillance des systèmes et l’impact de l’environnement direct sur l’institution.
- L’incendie reste la menace absolue pour des bâtiments souvent anciens et des collections irremplaçables.
- Les risques climatiques sont de plus en plus présents : une inondation (crue de rivière ou ruissellement) peut dévaster des réserves situées en sous-sol, une tempête peut endommager des toitures et provoquer des infiltrations.
- La défaillance technique (panne électrique majeure, rupture de la climatisation…) peut avoir des conséquences désastreuses sur la conservation des œuvres les plus fragiles. Face à ces menaces, la réponse technique est le Plan de Sauvegarde des Biens Culturels (PSBC), que nous détaillerons plus bas.
2. Les crises de sûreté et de malveillance : du vandalisme à l’attentat
Ces crises sont liées à une intentionnalité humaine. Si vous avez déjà été dans un des musées parisien en été vous le savez.
- Le vol d’œuvres d’art est un risque classique, demandant des dispositifs de sûreté de haut niveau.
- Le vandalisme, notamment par des militants qui utilisent les œuvres comme tribune pour leur cause, est un phénomène en pleine expansion. L’impact est à la fois matériel et médiatique.
- La menace terroriste dans un Lieu Recevant du Public (ERP) aussi emblématique et fréquenté qu’un grand musée est un scénario à fort impact qui doit être préparé.
3. Les crises de réputation et de communication : quand l’art crée la polémique
Le cœur de métier, des musées et des institutions culturelles – l’exposition et l’interprétation – est lui-même une source potentielle de crise.
- La controverse artistique ou scientifique : Une exposition jugée polémique, des accusations sur la provenance d’une œuvre (restitution), une publication qui dérange…
- Le « bad buzz » : Un incident avec un visiteur qui devient viral, une campagne de communication jugée maladroite.
- La mise en cause de mécènes ou de partenaires : L’association de l’institution avec un partenaire dont les activités sont soudainement critiquées publiquement.
4. Les crises sociales et managériales : les tensions en coulisses
Une institution culturelle est aussi une entreprise avec des salariés.
- Le conflit social : Une grève des agents d’accueil et de surveillance en pleine exposition à succès peut paralyser l’établissement et créer une crise majeure avec le public et les tutelles.
- La crise managériale : Des accusations de harcèlement ou de mauvaises conditions de travail peuvent gravement ternir l’image d’une institution qui se veut porteuse de valeurs humanistes.
Le Plan de Sauvegarde des Biens Culturels (PSBC) : le cœur de la résilience matérielle
Face aux risques physiques, un document est au cœur de la préparation : le Plan de Sauvegarde des Biens Culturels (PSBC). Ce n’est pas un simple inventaire. C’est un plan opérationnel qui répond à des questions vitales en cas de sinistre :
- Quelles sont les œuvres prioritaires à évacuer ? Le PSBC établit une hiérarchie claire (les « incontournables », les œuvres de grande valeur, les plus fragiles…).
- Où les évacuer ? Il identifie des zones de repli internes (salles protégées) et externes (partenariat avec un autre musée, un entrepôt sécurisé…).
- Qui fait quoi ? Il définit la chaîne de commandement et les rôles de l’équipe de sauvegarde (régisseurs, restaurateurs, sécurité…).
- Comment les manipuler et les transporter ? Il contient les fiches techniques pour la manipulation et le conditionnement d’urgence de chaque œuvre prioritaire.
Un PSBC testé régulièrement par des exercices est la seule garantie de ne pas céder à la panique et de sauver ce qui peut l’être le jour J.
La communication de crise culturelle : gérer l’émotion et la confiance
Communiquer sur une crise touchant le patrimoine est un exercice d’une extrême sensibilité.
- Parler à un public d’attachés : Les visiteurs d’un musée ne sont pas de simples clients, ce sont souvent des passionnés. La communication doit être factuelle, mais aussi chargée d’empathie. Il faut reconnaître et partager l’émotion collective, tout en montrant que la situation est maîtrisée.
- Gérer des parties prenantes complexes : La communication doit être parfaitement coordonnée entre l’institution, ses instances de gouvernance (conseil d’administration), ses mécènes et ses tutelles (Ministère de la Culture, Mairie…). Chaque acteur doit parler d’une seule voix.
- Répondre à une controverse : Face à une polémique, la pire des stratégies est le silence ou le déni. Il faut rapidement mettre en place une cellule de réponse, préparer un argumentaire basé sur des faits (scientifiques, historiques) et organiser la parole de ses experts (commissaire d’exposition, historien d’art…) pour reprendre le contrôle du récit.
Conclusion : la résilience, un acte de transmission pour les musées
Protéger les musées et les institutions culturelles, c’est bien plus que gérer une entreprise. C’est un acte de transmission. C’est s’assurer que le patrimoine que nous avons reçu en héritage pourra être transmis aux générations futures. Cette responsabilité immense exige une préparation à la crise qui soit à la fois d’une rigueur technique absolue (avec le PSBC) et d’une grande finesse humaine (dans la communication et la gestion des équipes). La résilience culturelle est à ce prix.
Chez CriseHelp, nous mettons notre expertise au service de ce secteur unique. Nous vous aidons à réaliser votre audit de vulnérabilité, à construire votre PSBC, à préparer votre stratégie de communication et à entraîner vos équipes pour protéger l’inestimable.
Nous sommes à votre écoute pour préciser votre besoin de préparation à la crise.
Nos experts et consultants indépendants sont en mesure de vous accompagner de A à Z dans l’évaluation de vos risques pour anticiper les crises.
FAQs
Questions fréquentes sur la crise dans le secteur culturel
Qu'est-ce qu'un Plan de Sauvegarde des Biens Culturels (PSBC) en pratique ?
En pratique, c'est un classeur de crise, souvent doublé d'une version numérique, qui contient des fiches action pour chaque scénario (incendie, inondation...). On y trouve la liste hiérarchisée des œuvres avec leur photo, leur localisation, leur poids, leurs dimensions, le matériel nécessaire à leur évacuation (chariot, sangles...) et leur destination (la "zone refuge").
Comment gérer un acte de vandalisme par des militants sur une œuvre ?
La réponse doit être sur deux niveaux. Opérationnel : isoler la scène, faire constater les dégâts par des experts, porter plainte. Communicationnel : communiquer très rapidement pour décrire les faits de manière neutre, condamner l'acte sans attaquer la cause (pour ne pas envenimer le débat), rassurer sur l'état de l'œuvre et rappeler la mission du musée, qui est de préserver et de rendre accessible le patrimoine à tous.
Une petite fondation ou un petit musée a-t-il vraiment besoin d'un plan de crise ?
Oui, et peut-être même plus qu'un grand musée. Avec des ressources humaines et financières plus limitées, une petite structure est bien plus vulnérable. Un plan de crise et un PSBC, même simplifiés, sont indispensables. Ils peuvent se concentrer sur les 10 œuvres les plus importantes et sur des procédures de base, mais ce travail d'anticipation est la meilleure garantie de survie en cas de sinistre.
