Un Plan de Sauvegarde des Biens Culturels (PSBC) est un document stratégique et un plan d’action opérationnel qui organise la protection du patrimoine d’une institution (musée, archives, bibliothèque, monument historique…) en cas de sinistre majeur. Son objectif principal est de permettre l’évacuation priorisée et maîtrisée des œuvres et collections les plus importantes pour les mettre en sécurité. L’incendie de Notre-Dame de Paris l’a tragiquement rappelé : lorsque le pire survient, la capacité à sauver les trésors irremplaçables ne relève pas de l’improvisation, mais d’une préparation minutieuse.

Loin d’être un simple inventaire, le PSBC est le « plan ORSEC » du patrimoine. C’est la feuille de route qui guide les équipes internes et les services de secours au cœur du chaos. Chez CriseHelp, nous considérons son élaboration comme l’acte de gestion le plus fondamental pour tout gardien de notre héritage collectif.

musées psbc

Pourquoi un PSBC est-il vital pour toute institution culturelle ?

 

La mise en place d’un PSBC répond à une triple nécessité :

  1. Protéger l’irremplaçable : Contrairement à un stock industriel, une collection patrimoniale est par nature unique. La perte d’une œuvre est définitive. Le PSBC est la seule démarche qui permet de prioriser les efforts pour sauver ce qui a le plus de valeur (historique, artistique, scientifique ou symbolique).
  2. Faciliter et sécuriser l’intervention des secours : En cas d’incendie, les sapeurs-pompiers ont besoin de savoir rapidement où se trouvent les œuvres prioritaires et comment y accéder en sécurité. Un PSBC clair et partagé avec le SDIS local est un outil d’aide à la décision inestimable qui peut faire gagner des minutes précieuses.
  3. Remplir une mission fondamentale : La première mission d’un conservateur ou d’un directeur d’établissement est d’assurer la transmission du patrimoine dont il a la charge. Le PSBC est la matérialisation de cette responsabilité.

 

 

L’anatomie d’un PSBC : que contient ce document stratégique ?

Un PSBC efficace n’est pas un roman, mais une boîte à outils opérationnelle. Il se compose de plusieurs éléments clés.

 

1. L’inventaire hiérarchisé des collections

C’est le cœur du plan. Il ne s’agit pas de lister toutes les œuvres, mais de les classer par ordre de priorité de sauvegarde, souvent avec un code couleur simple (ex: pastilles rouges pour les trésors nationaux à sauver absolument, oranges pour les œuvres majeures, vertes pour les œuvres importantes mais non prioritaires). Cette hiérarchisation est un travail stratégique mené par les conservateurs.

 

2. Les fiches de sauvegarde par œuvre prioritaire

Chaque œuvre identifiée comme prioritaire (pastille rouge ou orange) dispose de sa propre « fiche réflexe » qui contient :

  • Une photo d’identification.
  • Sa localisation précise dans le bâtiment (salle, vitrine).
  • Ses caractéristiques (dimensions, poids, fragilité).
  • Les instructions de manipulation et de conditionnement d’urgence (type de caisse, nombre de porteurs nécessaires…).
  • L’itinéraire d’évacuation recommandé.

 

3. La cartographie des lieux et des moyens

Le PSBC inclut un jeu de plans clairs du bâtiment qui indiquent :

  • La localisation des œuvres prioritaires.
  • Les itinéraires d’évacuation.
  • L’emplacement des coupures d’énergie et des réseaux (eau, gaz, électricité).
  • La localisation du matériel d’intervention (chariots, caisses, matériel de protection…).
  • L’emplacement de la « zone refuge » : un lieu sûr, identifié à l’avance (interne ou externe), où les œuvres évacuées seront temporairement stockées et inventoriées.

 

4. L’organisation de l’équipe de sauvegarde

Le plan définit précisément le « qui fait quoi ». Il identifie les membres du personnel formés (conservateurs, régisseurs, techniciens, agents de sécurité) qui composent l’équipe de sauvegarde, et leur attribue des rôles clairs (chef d’équipe, coordinateurs, porteurs, emballeurs…).

 

La méthode en 5 étapes pour construire son PSBC

 

  1. Constituer l’équipe projet : Réunir autour de la table toutes les compétences clés : direction, conservateurs, régisseurs d’œuvres, responsable sécurité/sûreté, et idéalement, un officier de prévention du SDIS local.
  2. Analyser les risques et les vulnérabilités : Évaluer les menaces qui pèsent sur le bâtiment (incendie, inondation…) et leurs conséquences potentielles sur les collections.
  3. Hiérarchiser les collections : C’est l’étape la plus longue et la plus délicate. Elle demande des arbitrages stratégiques de la part des équipes scientifiques sur la valeur des œuvres.
  4. Rédiger le plan et préparer le matériel : Formaliser toutes les informations dans le document PSBC et constituer des lots de matériel d’intervention (gants, lampes, chariots, matériaux de calage…) pré-positionnés.
  5. Former, exercer et faire vivre le plan : Un PSBC qui n’est pas testé est un document inutile. Il est crucial d’organiser des exercices réguliers (au moins une fois par an) pour entraîner l’équipe de sauvegarde et vérifier que les procédures sont réalistes.

 

Le Bouclier Bleu, un allié stratégique pour votre PSBC

 

Dans l’écosystème de la protection du patrimoine, un acteur joue un rôle fédérateur essentiel : le Bouclier Bleu. Souvent qualifié de « Croix-Rouge de la culture », il s’agit d’un comité international, représenté en France par le Comité français du Bouclier Bleu (CFBB), qui se consacre à la protection du patrimoine culturel en cas de catastrophe ou de conflit armé. Son rôle n’est pas de rédiger le PSBC à la place de l’institution, mais de l’aider à le concevoir, à le tester et, en cas de crise, à le mettre en œuvre plus efficacement. Le Bouclier Bleu agit comme un facilitateur en :

  • Formant les professionnels de la culture et les services de secours aux enjeux spécifiques de la sauvegarde.
  • Mettant en réseau les institutions culturelles avec les acteurs de la sécurité civile pour créer un dialogue en amont.
  • Mobilisant, en cas de sinistre majeur, son réseau de volontaires experts (restaurateurs, archivistes…) pour apporter un appui aux opérations de sauvetage et de post-crise. S’associer ou se rapprocher du Bouclier Bleu, c’est donc s’entourer d’une expertise et d’un réseau qui renforcent considérablement la robustesse et la crédibilité de votre PSBC.

 

Le PSBC en action : le jour où tout bascule

Imaginons une alarme incendie qui se déclenche la nuit. Grâce au PSBC, la routine est claire. L’équipe d’astreinte, en lien avec le commandant des opérations de secours, peut immédiatement :

  1. Consulter le classeur PSBC.
  2. Guider les pompiers vers les salles contenant les œuvres « pastille rouge ».
  3. Une fois l’autorisation du commandant des secours obtenue, procéder à l’évacuation des œuvres prioritaires en suivant les fiches réflexes, vers la zone refuge prédéfinie. Ce qui aurait été une improvisation chaotique devient une procédure maîtrisée qui sauve l’irremplaçable.

 

Conclusion : un acte de responsabilité et de transmission

Le Plan de Sauvegarde des Biens Culturels est l’incarnation de la mission de gardien du patrimoine d’une institution. C’est un document exigeant à construire, mais il est la seule garantie qu’en cas de sinistre, le pire pourra être évité et que l’irremplaçable sera protégé. Dans un monde où les menaces sur notre héritage se multiplient, l’élaboration et la mise à jour d’un PSBC ne sont plus une option, mais un devoir fondamental de transmission.

Chez CriseHelp, nous mettons notre expertise en méthodologie de crise et en planification au service des institutions culturelles. Nous vous aidons à structurer votre démarche, à animer les ateliers de hiérarchisation, à formaliser votre plan et à organiser des exercices réalistes pour que, le jour J, votre patrimoine soit entre de bonnes mains.

Nous sommes à votre écoute pour préciser vos besoins en gestion de crise.

Nos experts et consultants indépendants sont en mesure de vous accompagner de A à Z dans l’évaluation de vos risques pour anticiper les crises.

FAQs

Questions fréquentes sur le PSBC

Le PSBC est-il une obligation légale en France ?

Pour les Musées de France, l'élaboration d'un PSBC est une obligation réglementaire inscrite dans le Code du Patrimoine. Pour de nombreuses autres institutions (monuments historiques, bibliothèques...), même si ce n'est pas toujours une obligation légale stricte, c'est une recommandation pressante des services de l'État (Ministère de la Culture, préfectures) et une exigence de la part des assureurs.

Comment se coordonne le PSBC avec l'intervention des sapeurs-pompiers ?

Idéalement, le PSBC est élaboré en lien avec le SDIS local. Le jour du sinistre, un exemplaire du plan est remis au Commandant des Opérations de Secours (COS). C'est lui, et lui seul, qui autorise l'équipe de sauvegarde de l'établissement à pénétrer dans le bâtiment pour procéder à l'évacuation des œuvres, uniquement lorsque les conditions de sécurité pour les personnes sont réunies.

Un PSBC ne concerne-t-il que les œuvres d'art ?

Non. Le terme "Biens Culturels" est très large. Dans une bibliothèque, il concernera les manuscrits les plus précieux ou les fonds uniques. Dans un centre d'archives, il visera les documents fondateurs ou les fonds les plus consultés. Dans un musée d'histoire naturelle, il peut concerner un spécimen rare. Chaque institution définit ce qui constitue son patrimoine le plus critique à sauvegarder.