La désinformation est devenue une « véritable arme de guerre ».
Cette affirmation, issue du nouveau guide contre la désinformation publié par le ministère des Armées en juillet 2025, marque un tournant. Longtemps perçue comme un simple problème de « fake news » sur les réseaux sociaux, la manipulation de l’information est aujourd’hui officiellement reconnue comme une menace stratégique. Pour les entreprises et les institutions, la leçon est claire : une crise ne naît plus seulement d’un incident physique ou d’une panne, mais d’un récit, d’une rumeur, d’une information délibérément faussée.
Cette guerre informationnelle n’est plus l’apanage des États. Votre organisation, quelle que soit sa taille, est à la fois une cible et, sans le vouloir, un relais potentiel. Chez CriseHelp, nous voyons la crise de désinformation comme l’un des risques les plus complexes à gérer. En s’appuyant sur la doctrine et les outils de l’État, ce guide vous donne les clés pour comprendre, détecter et agir.
La désinformation, une crise à part entière : comprendre la menace
Le guide du ministère le rappelle : la désinformation est la
diffusion intentionnelle d’informations inexactes dans le but de tromper et de causer un préjudice. Ses objectifs sont multiples : influencer l’opinion publique, semer le doute, démoraliser, ou masquer des réalités de terrain.
Pour une organisation, les conséquences sont directes et potentiellement dévastatrices :
- Dégradation de la réputation : Une fausse information sur la qualité de vos produits ou vos pratiques managériales peut détruire des années de confiance.
- Déstabilisation interne : Des rumeurs peuvent miner le moral des salariés et créer des conflits.
- Impact économique : Une rumeur peut faire chuter un cours de bourse ou détourner les consommateurs.Saturation de la cellule de crise : Gérer une crise informationnelle consomme un temps et une énergie considérables, qui ne sont plus alloués à la gestion des opérations.
« Comprendre, détecter, agir » : la doctrine de l’état appliquée à votre organisation
Le ministère des Armées a structuré son approche de la lutte informationnelle autour d’un triptyque simple et puissant :
Comprendre, Détecter, Agir. Adoptons cette doctrine pour construire votre propre plan de défense.
1. Comprendre : cartographier vos vulnérabilités informationnelles
Avant de pouvoir vous défendre, vous devez comprendre d’où pourrait venir une attaque.
- Quels sont vos « points de friction » ? Quels sont les sujets sensibles pour votre organisation (environnement, social, produits…) qui pourraient être exploités par des acteurs malveillants ?
- Qui sont vos adversaires potentiels ? Un concurrent, un groupe activiste, un État étranger (comme le montre le guide avec de faux sites de recrutement militaire ) ?
- Quels sont vos canaux les plus exposés ? Les réseaux sociaux sont le principal vecteur (88% des fake news y circulent), avec une prédominance de X et TikTok.
2. Détecter : les réflexes pour identifier une manipulation
Le guide fournit une excellente checklist pour développer un esprit critique. Une information est suspecte si elle…
- Ne cite pas ses sources de manière précise.
- Est chargée d’émotions fortes (peur, colère, indignation).
- Contient des fautes d’orthographe ou des incohérences.
- Cadre un peu trop parfaitement avec vos propres convictions (biais de confirmation).
- Vient d’un site web au design peu soigné, sans cadenas de sécurité ou avec des publicités agressives
Au sein de votre cellule de crise, ces réflexes doivent être complétés par des
outils de veille professionnels et la consultation systématique des sites de fact-checking reconnus (AFP Factuel, Les Décodeurs, CheckNews…).
3. Agir : le plan de réponse à une crise informationnelle
Lorsque votre organisation est la cible d’une campagne de désinformation, il faut agir vite et de manière coordonnée.
- Qualifier la menace : Est-ce une simple rumeur isolée ou le début d’une campagne organisée ?
- Ne pas laisser le terrain vide : Le silence est souvent interprété comme un aveu. Il faut rapidement occuper l’espace avec votre propre récit.
- Démentir avec des faits (Debunking) : Publiez un démenti clair, factuel et sourcé. Appuyez vous sur des tiers de confiance (experts reconnus, autorités…). Le ministère des Armées a par exemple immédiatement démenti l’existence du faux site de recrutement pour l’Ukraine.
- Utiliser tous vos canaux : Le démenti doit être visible sur votre site internet, vos réseaux sociaux, et envoyé à vos parties prenantes internes (salariés) et externes (clients, partenaires).
- Porter plainte : La désinformation n’est pas une fatalité, c’est souvent un délit.
Le lexique du champ de bataille informationnel
Pour combattre l’ennemi, il faut parler sa langue. Voici quelques termes essentiels tirés du guide:
- Deepfake : Contenu audio ou vidéo (très réaliste) modifié ou créé par une IA pour faire dire à quelqu’un des choses qu’il n’a jamais dites.
- Malinformation : Une information vraie mais sortie de son contexte et utilisée dans le but de nuire. C’est l’une des formes les plus pernicieuses de manipulation.
- Mésinformation : La diffusion d’une fausse information sans intention de nuire (par erreur, par naïveté). Votre rôle est aussi d’aider votre communauté à ne pas la relayer..
- Usines à trolls : Des organisations, souvent étatiques, qui emploient des personnes pour créer des polémiques et propager de la désinformation de manière industrielle sur les réseaux sociaux.
Conclusion : la résilience cognitive, nouvelle frontière de la gestion de crise
Le guide du ministère des Armées est un signal clair : la guerre de demain se joue aussi dans nos esprits. Pour les organisations, la
lutte informationnelle est devenue une composante à part entière de la gestion de crise. Se préparer, c’est former ses équipes à la détection des manipulations, mettre en place une veille efficace et avoir un plan de réponse prêt à être activé. C’est développer une véritable résilience cognitive collective.
Chez CriseHelp, nous intégrons cette nouvelle donne dans nos accompagnements. De la préparation de votre communication de crise à l’entraînement de vos équipes par des simulations de « bad buzz » ou de campagnes de désinformation, nous vous aidons à protéger votre atout le plus précieux : votre réputation.
Nous sommes à votre écoute pour préciser votre besoin.
Nos experts et consultants indépendants sont en mesure de vous accompagner de A à Z dans l’évaluation de vos risques pour anticiper les crises.
FAQs
Questions fréquentes sur la désinformation
Quelle est la différence entre désinformation, mésinformation et malinformation ?
Désinformation : Faux + Intention de nuire.
Mésinformation : Faux + Pas d'intention de nuire.
Malinformation : Vrai + Intention de nuire (ex : une vraie information privée révélée pour nuire à quelqu’un).
Comment réagir rapidement à une fake news qui nous concerne ?
La clé est la préparation. Ayez un circuit de validation de l'information de crise ultra-court ("war room"). Ayez des modèles de communiqués de démenti pré-rédigés. Identifiez à l'avance qui est le porte-parole légitime. La rapidité naît de l'anticipation.
Faut-il toujours démentir une rumeur, même petite ?
C’est une décision stratégique. Démentir une petite rumeur confidentielle peut parfois lui donner une visibilité qu’elle n’avait pas (effet Streisand).
La règle générale est la suivante : si la rumeur reste confinée et n’a pas d’impact, une simple veille suffit. Si elle commence à se propager et peut affecter votre activité ou votre réputation, un démenti rapide, proportionné et factuel s’impose.