Vous avez beau posséder toutes les connaissances théoriques, maîtriser parfaitement les gestes de votre métier, il y a des jours où rien ne se passe comme prévu. Une situation de stress intense, un imprévu, un interlocuteur difficile, et soudain, votre expertise semble s’envoler. Vous perdez vos moyens, prenez une mauvaise décision ou commettez une erreur que vous ne feriez jamais en temps normal.
Cette déconnexion entre ce que l’on sait et ce que l’on fait réellement sous pression est l’une des expériences humaines les mieux partagées. Elle révèle une vérité fondamentale souvent ignorée dans nos formations et nos parcours professionnels : le savoir seul ne suffit pas pour garantir la performance.
Chez CriseHelp , nous savons que la gestion des situations difficiles passe par la compréhension des mécanismes humains. Cet article explore pourquoi votre cerveau peut vous jouer des tours et comment les compétences non techniques (NTS) sont l’ingrédient secret pour non seulement survivre aux crises, mais aussi exceller au quotidien.
Notre cerveau, un allié puissant mais limité
Pour comprendre pourquoi nous pouvons échouer malgré notre savoir, il faut d’abord accepter une réalité biologique : notre cerveau n’est pas un ordinateur. Il est le produit d’une longue évolution, conçu pour assurer notre survie, pas pour exécuter des tâches complexes avec une fiabilité de 100%.
Les biais cognitifs : quand notre cerveau nous joue des tours
Avez-vous déjà entendu parler de l’expérience du gorille invisible ? Des experts, à qui l’on demande de se concentrer sur une tâche précise sur un scanner sous la pression du temps, sont incapables de voir un gorille évident qui traverse l’image. Cela illustre deux mécanismes puissants :
- Le biais d’ancrage : notre cerveau se focalise sur les premières informations perçues comme importantes et ignore le reste.
- La pression temporelle : le stress limite notre champ de perception et de réflexion.
Dans votre vie professionnelle ou personnelle, ce biais peut vous amener à vous concentrer sur un détail d’un problème (une critique, un chiffre) et à manquer une information cruciale, bien plus évidente et importante.
Une capacité de traitement étonnamment faible
Les chiffres sont vertigineux. Notre corps envoie environ 11 millions de bits d’informations par seconde à notre cerveau (température, équilibre, signaux internes…). Cependant, notre cerveau conscient, la partie dite « intelligente » (le cortex préfrontal), ne peut en traiter qu’environ 50 par seconde.
Face à une situation complexe, nous sommes donc submergés d’informations. Notre cerveau ne choisit pas de tout analyser ; il sélectionne ce qui lui semble le plus cohérent ou le plus menaçant, en se basant sur des raccourcis.
Le poids des émotions et du stress
En situation de crise ou de forte pression, notre cerveau reptilien prend le dessus. L’amygdale, notre « garde du corps » interne, détecte une menace et déclenche la fameuse réponse « combat ou fuite » (fight or flight).
Les conséquences sont immédiates et physiologiques :
- Le cortex préfrontal, siège du raisonnement, est « débranché ».
- La vision périphérique se réduit, l’ouïe diminue.
- Le jugement et la prise de décision sont altérés.
On se retrouve alors en mode « pilote automatique », agissant par réflexe plutôt que par réflexion. C’est ce qui explique pourquoi une personne très compétente peut se précipiter, oublier une procédure clé ou même se retrouver paralysée (sidération) face à un imprévu.
La différence cruciale : connaissance, compétence et performance
Il est essentiel de distinguer ces trois notions pour progresser.
- La connaissance : C’est ce que vous avez appris, ce que vous pouvez réciter. C’est la théorie.
- La compétence : C’est ce que vous savez faire dans un environnement contrôlé, sans pression. C’est la pratique en conditions idéales.
- La performance : C’est ce que vous faites réellement au quotidien, un jour de fatigue, avec un client mécontent, face à un imprévu et sous le regard des autres.
Le véritable enjeu n’est pas d’accumuler plus de connaissances, mais de transformer ses compétences en une performance fiable et constante, quelles que soient les circonstances.
Les compétences non techniques (NTS) : votre boîte à outils pour l’excellence
C’est ici qu’interviennent les facteurs humains et les compétences non techniques. Popularisées dans des domaines à haut risque comme l’aviation ou l’anesthésie, où l’erreur a des conséquences dramatiques, elles sont en réalité universelles.
Les NTS sont l’ensemble des aptitudes qui permettent d’utiliser au mieux ses connaissances techniques. Voici les plus importantes :
- La conscience de la situation : La capacité à percevoir et comprendre ce qui se passe réellement autour de vous, à anticiper les évolutions et à vous adapter en permanence.
- La prise de décision fiable : Savoir évaluer une situation rapidement mais sans précipitation, même sous stress, pour choisir la meilleure option possible.
- La communication claire et fiable : Être capable de transmettre et de recevoir des informations de manière efficace, même dans un environnement bruyant ou tendu, pour éviter les malentendus.
- Le leadership et le travail d’équipe : Savoir gérer les ressources humaines autour de soi, motiver, déléguer et collaborer pour atteindre un objectif commun.
- La gestion de la charge de travail et du stress : Reconnaître ses propres limites, savoir planifier ses tâches pour éviter la surcharge et utiliser des techniques pour réguler son niveau de stress.
- La connaissance de soi : Comprendre comment vous réagissez à la fatigue, à la frustration ou à la pression. C’est le point de départ pour mettre en place des stratégies de protection.
Ces compétences ne sont pas innées. Elles se travaillent, s’apprennent et s’entretiennent.
Comment développer ses compétences non techniques au quotidien ?
Vous n’avez pas besoin d’attendre la prochaine crise pour vous améliorer. On n’apprend pas à nager le jour où l’on se noie.
1. Accepter et apprendre de l’erreur
Notre cerveau fait en moyenne 4 à 6 erreurs par heure. L’erreur est humaine et inévitable. Plutôt que de la cacher ou de blâmer, considérez chaque erreur (la vôtre ou celle d’un collègue) comme une opportunité d’apprentissage. Demandez-vous : « Qu’est-ce qui, dans la situation, a conduit à cette erreur ? » et « Comment pouvons-nous améliorer le système pour qu’elle ne se reproduise pas ? ».
2. Maîtriser son environnement et limiter les interruptions
Une interruption peut sembler anodine, mais il faut en moyenne 3 minutes pour se reconcentrer pleinement sur sa tâche initiale. Des études montrent que toutes les huit interruptions, une erreur significative est commise. Action concrète : Créez des blocs de travail sans distraction. Coupez les notifications de votre téléphone et de votre ordinateur. Instaurez une règle au sein de votre équipe pour ne pas interrompre une personne concentrée sur une tâche importante.
3. S’inspirer des meilleurs : l’exemple de l’aviation
Les pilotes professionnels repassent leur licence tous les 6 mois, en étant évalués autant sur leurs compétences techniques que non techniques. Ils s’entraînent sans cesse à gérer des pannes et des crises en simulateur. Cette culture de la préparation et du débriefing est un modèle à suivre : préparez-vous au pire pour être bon tous les jours.
4. Pratiquer la conscience de soi
Prenez régulièrement le temps de vous « scanner » vous-même. Comment vous sentez-vous ? Êtes-vous fatigué, stressé, agacé ? Reconnaître son état émotionnel est la première étape pour l’empêcher de dicter vos actions. Des techniques simples de respiration ou de pleine conscience peuvent vous aider à « rebrancher » votre cerveau rationnel en quelques instants.
Devenez l’architecte de votre performance
Le maillon faible de la performance n’est souvent pas le manque de connaissance, mais l’incapacité à la déployer au bon moment. En comprenant les limites de votre cerveau et en développant activement vos compétences non techniques, vous ne faites pas que renforcer votre sécurité et votre efficacité professionnelle.
Vous améliorez votre bien-être, réduisez votre stress et celui de votre entourage, et transformez les situations de crise en occasions de démontrer votre véritable maîtrise.
Le premier pas est le plus simple : accepter que nous sommes humains. Le second est de décider, dès aujourd’hui, de cultiver ces compétences qui font toute la différence.
Nous sommes à votre écoute pour préciser votre besoin.
Nos experts et consultants indépendants sont en mesure de vous accompagner de A à Z dans l’évaluation de vos risques pour anticiper les crises.